Conjonctivite et COVID‐19 : une méta‐analyse
La pandémie de maladie à coronavirus 2019 (COVID‐19) a commencé comme une épidémie à Wuhan et s’est propagée de là au reste du monde. Les poumons sont le site principalement affecté par le COVID‐19 et la forme sévère de la maladie se caractérise par une pneumonie sévère, un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) et une hypercoagulation. 1
Jusqu’à présent, la voie de transmission exacte du COVID‐19 reste floue. Les voies respiratoires ne sont probablement pas la seule voie de transmission de cette infection virale ; certains auteurs ont émis l’hypothèse que les gouttelettes de COVID‐19, ou les mains infectées, peuvent également contaminer la conjonctive, qui pourrait représenter le site initial d’une propagation de l’infection. 2 La conjonctivite, aussi appelée « œil rose », est une maladie fréquente et son étiologie peut être bactérienne ou virale. Cela a déjà été décrit comme associé à une infection à coronavirus chez les humains et les animaux. 3
Des études récentes ont montré que la conjonctivite pourrait être une manifestation de la COVID‐19. 4 Parce que l’œil pourrait être considéré comme une porte d’entrée potentielle directe pour le virus, 5 il est intéressant d’analyser l’association entre la conjonctivite et la sévérité du COVID‐19 ; des données rares et contradictoires ont été rapportées. En particulier, seules trois études sur la population chinoise ont décrit ce sujet, 6 avec des résultats différents. Xia et al 7 n’ont pas trouvé d’augmentation de l’incidence de la conjonctivite dans les cas graves de COVID‐19 ; ils ont réalisé une étude prospective chez 30 patients COVID‐19 pour évaluer la présence du virus dans les larmes. 7 À l’inverse, Guan et al, 6 qui ont analysé rétrospectivement les caractéristiques cliniques de 1099 patients COVID‐19, et Wu et al, 8 qui ont étudié rétrospectivement les caractéristiques oculaires de 38 patients COVID‐19, ont rapporté une incidence accrue de conjonctivite chez les patients atteints d’une maladie grave .
Ainsi, pour mieux explorer cette question, cette méta‐analyse vise à évaluer l’incidence de la conjonctivite chez les patients atteints de COVID‐19 sévère et non sévère.
Les méthodes sont indiquées dans les documents d’information à l’appui.
Nous avons inclus des études portant sur des patients atteints de COVID‐19 qui évaluaient les formes sévères (comme la pneumonie sévère, la mortalité, le SDRA, l’utilisation de la ventilation mécanique ou la récupération en unité de soins intensifs) et les formes non sévères de la maladie et rapportaient l’incidence de la conjonctivite.
Trois études, 6, 7, 8 incluant 1167 patients, ont évalué l’évolution clinique des patients atteints de COVID‐19 et la présence ou l’absence de conjonctivite. Les caractéristiques cliniques des études sont présentées dans les documents d’information à l’appui. L’âge des patients inscrits variait d’une médiane de 47 à 68 ans et le sexe masculin était prédominant dans toutes les études.
La présence de COVID‐19 lors de la réaction en chaîne par polymérase conjonctivale (PCR) n’a été analysée que par Xia et Wu ; seulement dans 4% (3/68) des cas, la PCR a révélé la positivité du COVID‐19 (Supporting Information Material).
Le taux global de conjonctivite était de 1,1 % ; il était de 3 % et de 0,7 % chez les patients COVID‐19 sévères et non sévères, respectivement. La méta‐analyse a montré que les patients atteints d’une infection grave au COVID‐19 présentaient, à leur admission à l’hôpital, une incidence accrue de conjonctivite (rapport de cotes : 3,4 ; intervalle de confiance à 95 % : 1,1‐10,2 ; P
= 0,030) (Figure ). Aucune hétérogénéité entre les essais n’a été observée (je2 = 0); le biais de publication n’était pas statistiquement significatif (test d’Egger ; P= 0,336).
Méta‐analyse de la conjonctivite chez les patients atteints d’une maladie à coronavirus sévère vs non sévère 2019
Cette méta‐analyse fournit des preuves que la conjonctivite pourrait être associée à une forme plus grave de COVID‐19.
Des études antérieures ont fait état d’infections oculaires et de conjonctivites chez des animaux et des humains infectés par un coronavirus. 3 Cependant, le rôle de la conjonctive dans le COVID‐19 reste encore incertain. 9 , 10
Les résultats de cette étude pourraient avoir des implications cliniques importantes. Premièrement, les médecins doivent reconnaître la conjonctivite comme un signe possible de COVID‐19 associé à une forme grave de la maladie. Deuxièmement, considérant que l’œil pourrait être une voie COVID‐19, nous voulons souligner la nécessité d’utiliser un équipement de protection pour le personnel de santé et pour toutes les personnes qui entrent en contact avec un patient COVID‐19 suspecté ou diagnostiqué. Pour confirmer l’importance de la protection oculaire, une étude précédente chez des patients infectés par le SRAS‐COV‐1 a montré qu’un contact visuel non protégé était associé à la transmission de la maladie aux travailleurs de la santé. 11
Cette étude présente les limites suivantes. Premièrement, même si cette méta‐analyse a inclus 1167 patients COVID‐19, davantage d’études avec un nombre important de patients sont nécessaires pour avoir des résultats solides. Deuxièmement, l’écouvillonnage conjonctival pour tester l’implication locale du COVID‐19 n’a pas été rapporté dans toutes les études ; cependant, une étude précédente a montré que le test d’écouvillonnage conjonctival n’était positif pour le COVID‐19 que chez environ 5 % des patients. 8 Troisièmement, la population incluse dans cette méta‐analyse est composée uniquement de patients chinois qui pourraient avoir des caractéristiques cliniques différentes de celles des patients d’autres pays. De futures études dans d’autres populations seront nécessaires pour confirmer les résultats de cette méta‐analyse.
En conclusion, les résultats de cette méta‐analyse montrent que la conjonctivite peut représenter un signe d’infection au COVID‐19 associé à une forme plus sévère de la maladie et suggèrent l’utilisation d’équipements de protection pour toutes les personnes potentiellement exposées à des sujets infectés.
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